Grosses inquiétudes chez les professionnels du ferroviaire après la coupure pour près d’un an de la ligne France-Italie
Lundi 09 Octobre 2023
Grosses inquiétudes chez les professionnels du ferroviaire après la coupure pour près d’un an de la ligne France-Italie
En France comme en Italie, les réactions se multiplient suite à l’annonce, vendredi 29 septembre, de la fermeture pour près d’un an de la liaison ferroviaire entre les deux pays provoquée par l’éboulement survenu fin août en Maurienne. Les fortes inquiétudes portent sur les conséquences négatives de cette coupure sur l’économie, le tourisme et l’environnement.
Quelques chiffres permettent de prendre la mesure d’une situation particulièrement préoccupante. En 2022, la ligne historique reliant la France et l’Italie par la Savoie a enregistré la circulation de 10.500 trains dans les deux sens. Près de 3500 concernent les trains de passagers sur l’axe Paris-Milan (TGV de SNCF et Frecciarossa de Trenitalia), soit entre 1,5 et 2 millions de voyageurs. Quant aux 7000 trains de fret, ils ont transporté près de 3 millions de tonnes de marchandises, soit l’équivalent d’environ 200.000 poids lourds.
Par où vont passer les voyageurs et marchandises qui circulaient sur la ligne coupée ?
Se pose aujourd’hui la question de savoir par où vont passer tous ces flux pendant près d’un an. Compte tenu des très longs détours par la Suisse ou par Nice empruntés par les itinéraires ferroviaires alternatifs, l’essentiel des voyageurs devraient se tourner vers la voiture pour les trajets de moyenne distance et l’avion pour les longues distances.
Avec une vingtaine de vols quotidiens, la liaison Paris-Milan est déjà l’une des plus fréquentées d’Europe. La compagnie low-cost Volotea a d’ores et déjà annoncé la mise en place de vols supplémentaires.
Vers la « mort de l’intermodalité du fret ferroviaire » sur la ligne historique ?
Pas évident non plus de trouver des itinéraires alternatifs adaptés pour les trains de fret. « Il est facile de prévoir de graves répercussions sur le territoire, avec une augmentation du transport routier » a déclaré Dario GALLINA, Président de la Chambre de Commerce de Turin. « L'impact économique sur la logistique turinoise est déjà palpable » alerte Enzo POMPILO, Président de la Fédération italienne des transports. « Les travaux de réparation doivent être accélérés avec toutes les techniques possibles. Car cette longue interruption pourrait conduire à l'abandon définitif du corridor passant par le tunnel du Fréjus, entrainant la mort de l'intermodalité du fret ferroviaire sur cette ligne, déjà pénalisée par une infrastructure plus que centenaire »
« Avec le Lyon-Turin, les trains continueraient de circuler normalement » entre la France et l’Italie
Depuis 30 ans, le trafic sur la seule liaison de fret ferroviaire entre la France et l’Italie ne cesse de baisser en raison des faiblesses infrastructurelles (sévérité des pentes, manque de capacités et de fiabilité…) de cette ligne héritée du XIXème siècle qui n’est plus du tout adaptée aux attentes des professionnels et aux standards du transport international.
« Si nous avions déjà eu la nouvelle ligne Lyon-Turin, l’éboulement en Maurienne n'aurait pas touché le tunnel souterrain par lequel passeraient les trains, qui aujourd'hui continueraient à circuler normalement » ne manque d’ailleurs par de souligner Paolo FOIETTA, Président de la commission intergouvernementale pour le Turin-Lyon.
Côté français, c’est également un coup dur pour les entreprises ferroviaires opérant vers la France. Les opérateurs fédérés par l’AFRA, qui fédère les opérateurs concurrents de la SNCF, assurent en temps normal 45 circulations hebdomadaires sur cet axe vital. Depuis la fermeture de la ligne, peu de solutions alternatives ont ainsi été trouvées.
« Les membres de l’AFRA souhaitent unanimement que le projet Lyon-Turin aille à son terme »
En raison de multiples contraintes techniques et opérationnelles, DB Cargo France, filiale du géant allemand de fret ferroviaire, n’a par exemple pu mettre en place que cinq allers-retours passant par la Suisse sur les dix-huit allers-retours France-Italie que l’entreprise opère chaque semaine en temps normal. « Certains de nos clients sont donc contraints de repasser leur acheminement sur la route, ce qui nous occasionne une perte d’un million d’euros par mois » explique Alexandre GALLO, P-DG de DB Cargo France.
Également Président de l’AFRA, Alexandre GALLO indique que ses membres « souhaitent que les travaux de réparation sur la ligne coupée puissent être réalisés le plus rapidement possible. Ils souhaitent également, et ce dans une belle unanimité, que le projet Lyon-Turin aille à son terme compte tenu de la récurrence des éboulements sur la ligne actuelle. »